Le libéralisme est-il de droite?

Le libéralisme est-il de droite?

« Le libéralisme est une valeur de gauche ». C’est par ces mots en apparence anodins qu’Emmanuel Macron concluait sa conférence du 27 septembre 2015. La gauche ne tarda pas à réagir poussant comme à son habitude des cris d’orfraie. « Traître », « suppôt du capital », « ultralibéral », les insultes pleuvent rue de Solferino. Pour tout homme de gauche respectable, le libéralisme est en effet irrémédiablement associé à la droite. A droite le libéralisme et sa cohorte d’inégalités, à nous le progrès social et l’égalité, entonne-t-on à gauche. Pourtant, rien ne prouve historiquement et philosophiquement que le libéralisme soit de droite. Au contraire, l’émergence de figures de gauche se revendiquant du libéralisme prouve que la droite n’a pas le monopole de la pensée libérale.

Le libéralisme est-il véritablement de droite ?

 

A l’origine, le libéralisme est une valeur de gauche

La pensée libérale émerge au XVIIIème siècle en France accompagnant le mouvement des lumières et le projet moderne. On l’oublie trop souvent mais le libéralisme fut constitutif du courant moderniste. La pensée libérale s’appuie comme lui sur l’idée que pour atteindre le bonheur l’homme se devait de s’émanciper de ces attaches traditionnelles et acquérir pleinement sa liberté en se détachant de tout déterminisme (1). Ce projet autonomiste se revendique authentiquement des valeurs progressistes dans le sens où l’humanité est sensée suivre un chemin linéaire vers une société idéale.

Or, le libéralisme utilise deux leviers pour créer une société où l’homme serait entièrement libre. D’une part, les libéraux considèrent que la poursuite des intérêts individuels conduit inévitablement à l’intérêt général. Cette philosophie fut pour la première fois défendue par Bernard Mandeville dans sa Fable des abeilles puis reprise par Adam Smith sous le terme de « main invisible du marché », cette dernière étant au cœur de l’idéologie libérale contemporaine de « l’ordre spontané » de Hayek au marché autorégulateur chère aux spéculateurs de Wall Street. D’autre part, la verticalité du pouvoir politique se doit d’être annihilée par une série de contre-pouvoirs visant à éviter tout despotisme. C’est pourquoi De l’esprit des lois de Montesquieu fut la véritable bible du libéralisme politique. Ce concept « d’équilibre des pouvoirs » sera repris par tous les intellectuels libéraux du XIXème siècle de Constant à Guizot en passant par Tocqueville.

Cette double condition de réalisation du libéralisme s’oppose sur bien des points à l’idée conservatrice pour qui l’homme ne saurait exister sans attaches traditionnelles et culturelles. En cela, le « Je ne connais pas d’hommes » (au sens d’un homme nu, séparé des traditions qui unissent la société) de Joseph de Maistre est l’antithèse du Libéralisme. Cette division opposant conservateurs et libéraux va structurer le débat politique, philosophique et même artistique (on pense à la bataille d’Hernani) du début du XIXème (2). Cette configuration place les libéraux à gauche de l’échiquier politique tandis que les conservateurs se placent à droite. Frédéric Bastiat, dont l’œuvre a influencé par la suite Margaret Thatcher et Ronald Reagan, siège alors à l’extrême-gauche. Par conséquent, et même si cela paraît surprenant, le libéralisme est à l’origine une idée de gauche.

 

1848 et l’avènement d’une nouvelle gauche

La chute de Louis-Philippe et l’avènement de la seconde république en 1848 marque un tournant majeur dans l’histoires des idées politiques en France. La révolution a fait de la classe ouvrière et du peuple (dans son sens plébéien) un acteur politique majeur tandis que la question sociale s’invite dans le débat politique. Apparaît dès lors un mouvement politique collectiviste souhaitant la fin du capitalisme. Ce n’est pas pour rien que Marx et Engels écrivent la même année Le Manifeste du parti communiste. A partir de cette année 1848, se produit ce que l’historien des idées Albert Thibaudet nommait « le mouvement sinistrogyre » (3), c’est-à-dire un mouvement qui déporte vers la gauche les idées politiques. Ainsi, l’avènement du socialisme et du marxisme pousse les libéraux vers la droite. C’est pourquoi René Remond écrivait en 1954 (4) que le libéralisme faisait partie intégrante de la famille de droite à travers la « droite orléaniste ». D’ailleurs, par deux fois, en 1848 et pendant la Commune, les libéraux choisiront l’alliance avec les conservateurs pour écraser les revendications ouvrières ce qui va imprégner à gauche l’image d’un libéralisme non seulement authentiquement de droite mais aussi foncièrement conservateur ce qui est de toute évidence totalement faux.

 

Le néo-libéralisme et le retour du conservatisme

Après une véritable éclipse politique pendant un siècle, la pensée libérale va renaître de ses cendres dans les années 70. Elle sera servie par un double processus se déroulant quasi-simultanément.

Premièrement, ces années sont marquées par une véritable révolution anthropologique (Marcel Gauchet) bouleversant l’ordre établi. Par une ruse de la raison chère à Hegel, la contre-culture anticapitaliste et libertaire des radical Sixties, dont Mai 68 en est la traduction française, va favoriser la victoire du néo-libéralisme (5). On peut parler de révolution anthropologiquement et philosophiquement libérale car ce mouvement libertaire visait à libérer l’individu de toutes les autorités traditionnelles. Par la même, le libéralisme et le socialisme ont le même objectif d’émancipation de l’individu, ils différent simplement par les moyens d’atteindre cet objectif (liberté absolue d’un côté, collectivisme de l’autre). Il n’est donc pas surprenant que beaucoup des plus ardents défenseurs du libéralisme de nos jours soient d’anciens gauchistes dans leur jeunesse (le cas de J-M Barroso est particulièrement parlant) confirmant l’intuition de Régis Debray pour qui un libéral est en fait un « marxiste retardataire » revenu de ses illusions collectivistes.

Le deuxième facteur de triomphe du néo-libéralisme est d’ordre économique. Le Keynésianisme jusqu’ici tout-puissant ne permet pas de résoudre la crise déclenchée par le choc pétrolier de 1973. Ce sont dès lors les économistes libéraux qui tiennent le haut du pavé. Hayek, Friedman et l’école de Chicago deviennent les vrais maîtres à penser de la nouvelle économie mondialisée.

Fort de ce double mouvement, le libéralisme s’impose comme la force politique dominante même si les français restent globalement réticents vis-à-vis de cette idéologie. A droite, depuis 1974 les libéraux l’ont emporté sur les gaullistes conservateurs. Cependant, le libéralisme ne touche pas que la droite. Une partie de la gauche voyant l’échec du socialisme et de la social-démocratie keynésienne se tourne vers le libéralisme. Macron ne fut donc pas le premier libéral de gauche, il n’est que le successeur des Jacques Delors, Michel Camdessus (ex patron du FMI), Pascal Lamy (ex patron de l’OMC), Jacques Attali ou encore Dominique Strauss-Kahn, tous des authentiques libéraux ayant leurs cartes au parti socialiste. De même, Michel Foucault, l’égérie intellectuelle de la gauche, fut fasciné par la portée émancipatrice du néo-libéralisme (6). Se développe donc au sein de la gauche un véritable courant libéral, encore minoritaire certes mais de plus en plus influent.

Or, depuis les années 90, nous assistons à un retour en force de la pensée conservatrice surtout parmi les classes populaires. Le retour en force des problématiques d’identité, de frontières ou de nations entraîne une droitisation de la société française, ce que le politologue Guillaume Bernard nomme « le mouvement dextrogyre », poussant le libéralisme vers la gauche. Ainsi, François Fillon a moins gagné les primaires du fait de son libéralisme économique que du fait qu’il a su profiter du renouveau conservateur en matière de mœurs au sein de l’électorat de droite. Le libéralisme devient donc de fait de plus en plus une idéologie de centre gauche.

 

Par conséquent, par un curieux renversement de tendance que seul l’histoire est capable de réaliser, le libéralisme revient à sa place d’origine à gauche de l’échiquier politique après deux siècles à droite. Le renouveau de la pensée conservatrice va entrainer immanquablement une refondation complète de la politique en France. Pour l’instant, la droite n’a pas saisi le mouvement dextrogyre abandonnant des thématiques entières au Front National. De l’autre côté, la gauche n’a pas totalement fait le deuil d’un grand projet de transformation collective même si une fois au pouvoir elle a tendance à s’accoutumer d’un certain libéralisme. C’est ce double phénomène, d’une part une droite de gouvernement qui s’accroche au libéralisme, d’autre part une gauche tentée par le « social-libéralisme » (expression médiatique qui au demeurant ne veut strictement rien dire) qui donne l’illusion d’un dépassement du clivage gauche-droite incarné par Macron. En réalité, nous assistons au retour de la configuration politique du XIXème siècle avec son courant conservateur (FN et une partie de la droite), libéral (une partie de la droite et de la gauche) et une gauche utopique (le PS de Hamon et Mélenchon). Ce sera de mon point de vue le clivage structurant de la politique dans les prochaines décennies.

 

(1)Voir l’ouvrage de Jean-Claude Michea, Le Complexe d’Orphée.

(2)Voir le livre de Jacques Julliard, Les gauches françaises.

(3)Albert Thibaudet, Les idées politiques de la France.

(4)René Rémond, Les Droites en France.

(5)Voir l’ouvrage de Christopher Lasch, La culture du narcissisme.

(6)Voir le livre de Geoffroy de Lagasnerie, La dernière leçon de Michel Foucault. Sur le libéralisme, la théorie et la politique.

Pourquoi l’Europe ne sera jamais une entité politique ?

Pourquoi l’Europe ne sera jamais une entité politique ?

Avis de tempête sur Bruxelles ! L’ouragan Trump venant des Etats-Unis est en train de balayer toutes les conventions entre les européens et leur grand « fédérateur » américain tandis que les britanniques ont décidé de quitter le bateau Europe en plein naufrage. Pour répondre à ces défis, nos eurocrates n’ont que les mots « unité » et « intégration » à leurs bouches. En somme, il faut toujours plus d’Europe pour sauver l’Europe. C’est bien connu ! « Les chauffards qui ont perdu le contrôle de leur véhicule ont souvent le réflexe d’accélérer, quitte à entraîner les passagers vers le précipice » (1).  Et si les européistes s’étaient fourvoyés dans une utopique union politique ?

Et si l’Europe ne sera au fond jamais une véritable entité politique ?

 

Une construction avant tout économique

J’appelle une véritable entité politique toute communauté de destin « donnant le sentiment qu’ils (les peuples) disposent d’un instrument pour comprendre le monde et peser sur son cours » selon la frappante expression du philosophe Marcel Gauchet (2).

Dès l’origine, l’Europe s’est construite sur la croyance que l’intégration économique engendrerait de facto une unité politique. Jean Monnet fut le grand inspirateur de ce programme. D’après Marcel Gauchet, « Monnet estime que l’on va pouvoir instaurer en Europe un gouvernement rationnel basé sur la coordination économique. » Pour ce marchand de cognac, la seule vérité n’est qu’économique où telle que l’avait dit Adam Smith la main invisible du marché s’assurera de transformer la somme des intérêts individuels en intérêt général. Les Etats nationaux sont ainsi voués à être dissous dans un grand marché économique et « confondus à la façon des capitaux de deux firmes concurrentes » selon la formule de De Gaulle. Monnet a donc fait sienne l’analyse de Benjamin Constant pour lequel l’âge de l’organisation de la production et des échanges s’est substitué à l’âge des grandes idéologies politiques.

Cette méthode « Monnet » connut un succès considérable au sein des élites européennes. Elle fut publiquement théorisée par un économiste hongrois Bela Balassa. Selon lui, une entité politique se construit en 5 étapes : ouverture des échanges commerciaux, union douanière, marché commun, union économique et union politique. On voit d’après ce schéma qu’on attribue à l’économie le pouvoir de faire émerger une entité politique. Toute la construction européenne, du traité de Rome (1957) à Maastricht (1992) fut donc basée sur cette théorie élevée au rang de dogme par les européistes.

 

Les contre-exemples américains et allemands

L’Europe s’est construite en prenant appui sur des modèles historiques : la construction des Etats-Unis et l’avènement de l’unité allemande au XIXème siècle. C’est pourquoi les élites parlent constamment des « Etats-Unis d’Europe » pour justifier leur fuite en avant.

Les Etats-Unis ne se sont-ils pas construits à partir de 13 Etats distincts ? On peut croire à première vue que l’intégration politique américaine est le fruit des échanges commerciaux entre les treize colonies. C’est oublier que toutes ces colonies étaient liées entre elles par un mythe fondateur, celui des pères pèlerins (Pilgrim fathers) créant à l’autre bout du monde une nouvelle « Jérusalem » bénie par Dieu. Cette religion civile, cette « foi Biblico-patriotique » est au cœur de la culture américaine. D’une certaine manière elle est le ciment qui donne le sentiment à un spéculateur de Wall Street et à un fermier de l’Arkansas d’appartenir à une même communauté de destin. L’Europe, à l’inverse, n’a pas de principe transcendant capable de créer un « démos » européen. Au contraire, il s’agit plutôt d’une juxtaposition de 28 peuples comme l’a confirmé l’arrêt de la cour de Karlsruhe (3), la plus haute autorité juridique en Allemagne.

L’Allemagne, justement, de par son unité acquise au XIXème siècle, est également considérée comme un exemple à suivre pour tout européiste en herbe. Les milieux européens présentent en effet régulièrement l’unité allemande comme la conséquence d’une politique d’intégration économique, le « Zollverein » (1834), en omettant le fait qu’il existait déjà une conscience nationale forgée par des siècles de vie commune sous le Saint-Empire Romain Germanique, sentiment qui sera ressuscitée après l’humiliation de Iéna (1806) avant que Sadowa (1865) et Sedan (1870) finissent par « trancher par le fer et le sang la question de l’unité allemande » (4).

Que ce soit aux Etats-Unis et en Allemagne, l’intégration économique n’a été pour rien quant à la construction d’une unité politique. Ce sont davantage les mythologies religieuses et nationales qui furent au fondement de leur construction politique.

 

L’économie ne fait pas société

« La France s’est faite à coup d’épées » nous disait le général De Gaulle, l’Europe se fera à coups de concurrence libre et non faussée nous disent les européistes. L’économie sera donc le principe unificateur d’une Europe déchirée par les divisions religieuses puis par les impérialismes, comme si un ensemble de transactions suffisait à créer une culture commune. C’est là tout le drame de l’Europe actuelle.

« Il se trouve que les hommes ne peuvent s’unir qu’en quelque chose qui les dépasse ». Cette phrase de Régis Debray raisonne avec d’autant plus d’échos que l’Europe s’est abandonnée à un mysticisme économique qui fait de l’accumulation des points de croissance la clé pour résoudre tous les problèmes. Or, « si la politique transforme un tas en tout, l’économie fait d’un tout un tas » (5). En d’autres termes, l’économie ne peut être un principe unificateur, elle ne saurait créer un sentiment d’appartenance à une communauté.

De même que 30 années de mondialisation économique n’ont jamais déboucher sur un gouvernement mondial, encore moins qu’à une hypothétique « fin de l’histoire », l’Europe politique ne peut se construire sur la seule économie. Partager la même monnaie n’a pas rendu les allemands plus proches des grecs. Toute entité politique se fonde en effet sur une croyance, un principe spirituel, une mystique aurait dit Péguy, qui donne à chaque individu le sentiment de faire partie d’un grand dessein. L’économie, quant à elle, est l’empire de l’horizontalité où se mêlent des homo oeconomicus mus exclusivement par la recherche de leurs propres intérêts au détriment de tout grand destin collectif.

 

« Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple » (6). Ernest Renan ne pouvait pas mieux définir ce qu’est un peuple. Or, toute entité politique repose sur un peuple ayant des valeurs et des objectifs communs ou alors il s’agit d’un empire qui exerce sa domination par la contrainte. Forcé de constater qu’il n’existe pas à l’heure actuelle de peuple européen permettant l’avènement d’une unité politique. La croyance en l’économie comme facteur d’unité politique s’est brisée sur la réalité. C’est au moment où l’intégration économique est la plus complète que les peuples européens deviennent les plus sceptiques sur l’idée européenne. Autant aux Etats-Unis qu’en Grande Bretagne et qu’en Chine, la loi du marché trouve son contrepoids dans une mystique biblico-patriotique ou nationale forgeant par là-même une communauté politique. A l’opposé en Europe, l’économie est devenue sa propre fin sans aucun culte collectif en mesure de compenser son emprise. C’est pourquoi l’Europe n’est pas une entité politique mais plutôt une ploutocratie, un despotisme mou de plus en plus coupé des peuples européens.

 

 

(1) L’expression est tirée d’une boutade de Jean-Pierre Chevènement dans son dernier livre Un défi de Civilisation, chap. « L’Europe après le Brexit ».

 (2) Comprendre le malheur français, Marcel Gauchet, chap. « Piège européen »

(3) Arrêt de la cour de Karlsruhe du 30 juin 2009.

(4) Expression tirée du livre de Jean-Pierre Chevènement Un défi de Civilisation, chap. « France-Allemagne : deux peuples dans l’histoire »

(5) Expression de Régis Debray dans son livre L’Erreur de calcul

 (6) Qu’est-ce qu’une Nation ? de Ernest Renan

Quelle politique américaine en Ukraine?

Quelle politique américaine en Ukraine?

Dans 15 jours, Barack Obama va laisser sa place à Donald Trump. L’un des dossiers non résolus qui sera transmis au nouveau président concerne la situation à l’Est de l’Ukraine. C’est sur ce dossier hautement sensible que la nouvelle administration républicaine sera attendue au tournant. Trump s’est déjà dit prêt à un « reset » des relations avec Poutine. S’il réussit, là où Obama a échoué, la politique américaine à l’Est de l’Europe s’en trouvera totalement bouleversée. L’Ukraine sera ainsi le juge de paix du rapprochement américano-russe.

Quelle est la politique menée par les Etats-Unis en Ukraine ? Quels changements peut-on attendre avec Trump ?

L’Ukraine : un objectif stratégique pour les Etats-Unis

Dès lors que l’empire soviétique s’est effondré, les Etats-Unis ont immédiatement su tiré profit de la situation en proposant aux russes un « partenariat stratégique responsable ». Or, une fois que les russes ont compris que cette politique menait à « l’assujettissement » de son peuple à l’hyperpuissance américaine, tout bascula.

 Les américains étendirent alors l’Otan aux pays de l’Est (2004) et ce au mépris des garanties qui ont été données à Gorbatchev en 1989. Leur objectif était de repousser plus à l’Est l’influence russe et ainsi d’empêcher la reconstitution d’un empire en Eurasie, dans ce « heartland » dont le géographe britannique Mckinder en faisait la clé de l’hégémonie mondiale. Sa devise « qui tient l’Europe orientale tient le heartland, qui tient le heartland domine l’île mondiale, qui domine l’île mondiale domine le monde » a été parfaitement compris à Washington.

L’Ukraine, intégrée dans l’orbite russe par le biais de la CEI (communauté des états indépendants), devient dès lors un enjeu majeur.220px-brzezinski_1977 C’est tous le sens de la doctrine Brzeziński (1) du nom de l’ancien secrétaire d’état de Jimmy Carter. Pour ce dernier, « sans l’Ukraine, la Russie cesse d’être un empire en Eurasie », l’Ukraine étant non seulement le cœur de l’Eurasie mais aussi un espace d’une importance considérable pour l’accès aux ressources naturelles. C’est pourquoi, les Etats-Unis vont s’efforcer de détacher l’Ukraine de l’influence russe. Dès lors dès 2008, au sommet de Bucarest, Georges Bush préconisait l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, idée finalement abandonnée devant le refus français et allemand.

La crise de 2014

L’évincement de Victor Ianoukovitch en février 2014 fut la cristallisation de la guerre d’influence entre russes et américains en Ukraine. La crise provient in fine d’un choix impossible laissé au gouvernement ukrainien : adhésion à l’Union Eurasiatique pilotée par Moscou ou adhésion à l’accord d’association proposé par Bruxelles dans le cadre du « partenariat oriental » de l’Union Européenne. L’Ukraine, qui a un pied dans chaque monde ne peut évidemment pas choisir sans déplaire à une partie de sa population. En choisissant l’Union Eurasiatique, les populations de l’Ouest, plus européennes de par leurs histoires (domination austro-hongroise et polonaise) se sont révoltées. L’inverse aurait été tout aussi vrai.

 Or, si l’on se penche de plus près, on peut s’apercevoir que l’accord d’association était porté par la Pologne ardemment antirusse et alliée stratégique majeure des Etats-Unis. De même, le soutien sur place à Kiev du vice-président Joe Biden, de Victoria Nuland du département d’Etat et du sénateur John McCain à la « révolution de Maidan » traduit une certaine emprise américaine sur les révolutionnaires ukrainiens. Encore une fois, comme le fut l’élargissement en 2004 et 2007, c’est sous le masque de l’Europe que les américains avancent leurs pions stratégiques confirmant la vision chevènementiste (2) d’une Europe « Saint-empire euraméricain ». A partir de là, l’administration Obama ne cessera de soutenir le gouvernement ukrainien dans sa guerre contre les rebelles pro-russes de l’Est.

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 Les changements à attendre sous l’administration Trump

S’il confirme sa volonté de rapprochement avec Poutine, Trump pourra faire de l’Ukraine le symbole d’une nouvelle ère. Pour lui, la politique d’Obama en Ukraine n’a fait que pousser la Russie dans les bras de la Chine, seul rival sérieux d’après Trump en mesure de contester le leadership américain. Le président élu souhaite donc diviser le bloc russo-chinois de la même manière que Nixon et Kissinger s’était allié avec la Chine de Mao contre l’URSS.

 La première mesure serait de faire respecter les accords de Minsk, bloqués jusque-là par la rada Ukrainienne. L’objectif à long terme est d’arriver à une « finlandisation » de l’Ukraine, c’est-à-dire un état neutre n’ayant pas pour vocation d’entrer à l’OTAN. Cette assurance doit s’accompagner d’un changement de regard sur la Russie. Cette dernière n’est pas attachée à l’Ukraine pour des raisons économiques ou géopolitiques. Elle y est attachée parce que l’Ukraine est le berceau de sa civilisation. C’est à Kiev que fut baptisé le prince Vladimir en 988, date qui fut constitutive de l’identité orthodoxe de la Russie. De même l’Ukraine est le pont reliant la Russie et l’Europe occidentale. C’est à travers l’Ukraine que la Russie peut se sentir pleinement européenne ce à quoi elle aspire depuis Pierre Le Grand. L’élection de Trump pourrait donc représenter une chance de recréer cette « maison commune européenne » que Mitterrand et Gorbatchev avait esquissé en leur temps.

L’Ukraine n’est donc pas un sujet mineur pour l’Europe, la Russie et les Etats-Unis. Obnubilés par la formation d’un bloc eurasiatique suffisamment fort pour contester son hégémonie, les Etats-Unis mène une politique de Roll Back (refoulement) de la Russie toujours plus vers l’Est. L’Ukraine fut le champ d’expérimentation de cette politique. C’était sans compter sur la détermination russe de conserver son influence dans son « étranger proche » d’autant plus que l’Ukraine est constitutive de son identité. L’Europe quant à elle prouve encore une fois son incapacité stratégique et son inculture historique. A la remorque des américains, elle tombe dans le piège d’une poutinophobie qui masque mal sa russophobie dont le journaliste suisse Guy Mettan (3) montrait qu’elle était la suite d’une guerre de 1000 ans entre l’Occident et la Russie. La Russie n’est ni l’ennemi des français ni des européens, il serait grand temps de le comprendre !

(1) Zbigniew Brzezinski , Le grand échiquier, L’Amérique et le reste du monde, Pluriel, 1997

(2) Jean-Pierre Chevènement, Un défi de civilisation, La seule stratégie pour la France, Fayard, 2016

(3) Guy Mettan, Russie-Occident, une guerre de mille ans : La russophobie de Charlemagne à la crise ukrainienne, Des Syrtes Eds, 2015

Autres conseils de lecture sur ce sujet :

Hervé Juvin, Le mur de l’Ouest n’est pas tombé, PIERRE-GUILLAUME DE ROUX, 2015

Le grand échiquier syrien : quelles solutions de sortie de crise pour la Syrie ?

Le grand échiquier syrien : quelles solutions de sortie de crise pour la Syrie ?

« Dans l’orient compliqué, il faut partir avec des idées simples » affirmait le général De Gaulle. Pourtant, il n’avait encore rien vu tant le Moyen-Orient est soumis de nos jours à des conflits sanguinaires et barbares. La Syrie est devenue l’épicentre de cette « guerre de trente ans », décrite par le géographe Michel Foucher, qui a causé la mort de plus de 200 000 personnes. Elle est devenue, malgré elle, le centre du monde étant donné le nombre de pays indirectement ou directement concernés par le conflit. L’extrême difficulté de la guerre en Syrie provient de la multiplication d’intérêts contradictoires entre les belligérants et l’extrême mouvance des alliances qui s’y nouent. On peut distinguer trois dimensions au conflit : local (entre les syriens eux-mêmes), régional (entre saoudiens, iraniens et turques) et international (entre russes et américains). Pour paraphraser Brzeziński (*), la Syrie s’est transformée en un immense échiquier mortifère avec plusieurs joueurs s’alliant ou s’opposant au gré des circonstances et qui tous utilisent leurs pions pour faire avancer leurs intérêts stratégiques. Avant donc de chercher une solution de crise, il est préférable de comprendre le jeu de chaque joueur ainsi que le nombre de pions qu’ils leur restent. C’est seulement une fois ce travail réalisé que des solutions de crise peuvent apparaître.

Quel est le jeu de chaque acteur ? Quelles solutions peut-on mettre sur la table pour sauver la Syrie ?

Le jeu des acteurs de la coalition anti-Assad

Cette coalition est extrêmement disparate et fragile. Elle est liée seulement par la volonté de voir Assad quitter le pouvoir. Trois acteurs participent à cette coalition : les pétromonarchies du Golfe, Arabie Saoudite en tête, la Turquie et les occidentaux.

Tout d’abord, les monarchies du Golfe interviennent dans le conflit syrien en finançant et en armant une partie de la rébellion. Leurs sensibilités wahhabites les tournent naturellement à soutenir des groupes salafistes, le Front Islamique pour les saoudiens, Jaïsh al-Islam pour le Qatar. Ces groupes sont présents principalement autour de Damas mais ont été particulièrement affaiblis ces derniers mois. Confronté au renouveau des chiites et à l’expansion de l’influence iranienne depuis la chute de l’Irak de Saddam Hussein (2003), le conseil de coopération du golfe qui regroupe l’ensemble de ces monarchies est obsédé par la crise syrienne d’autant plus que sa population est farouchement hostile à la dynastie Assad.

La Turquie est également un acteur clé du conflit. Ancien allié d’Assad, le président Erdogan a décidé en 2012 de soutenir la rébellion, principalement les groupes turkmènes du nord du pays et a demandé à Assad de quitter le pouvoir. Au fur et à mesure que le conflit avançait, les turques ont revu leur position, Assad n’étant plus la priorité, ce sont les kurdes qui sont devenus l’ennemi numéro un d’Ankara. En effet, depuis 2015 et la reprise du conflit entre l’armée turque et les rebelles kurdes du PKK, les turques bombardent régulièrement les positions du YPD, branche syrienne du PKK. Pour Ankara, l’établissement d’un état kurde indépendant le long de la frontière syro-turque est complètement inacceptable. C’est pourquoi l’armée turque est entrée en Syrie en Août 2016 prenant le contrôle de la province de Jarablous tenue par l’EI mais assiégée par le YPD rendant de fait impossible la continuité territoriale d’un Etat kurde indépendant. Au préalable, Ankara s’était assurée de la neutralité russe en abandonnant son soutien aux rebelles d’Alep. Par conséquent, le jeu turc consiste à empêcher coute que coûte l’indépendance du « Rojava », le Kurdistan syrien.

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Enfin, les occidentaux sont directement concernés par le conflit syrien. D’une part, ce dernier entraîne un afflux massif de réfugiés en Europe. D’autre part, les alliances militaires passées avec les pétromonarchies, la Jordanie et la Turquie les ramènent inexorablement au Levant. Pour eux, l’ennemi principal est l’Etat Islamique qu’ils bombardent depuis 2014. Ils sont également engagés contre Assad par le soutien au conseil national syrien (CNS) et son bras armé l’Armée syrienne libre (ASL) même si ces groupes sont très clairement minoritaires sur le terrain. La difficulté réside pour les occidentaux dans le fait qu’ils sont incapables d’adopter une stratégie claire pour préparer l’avenir de la Syrie. Il semble qu’avec l’arrivée de Donald Trump au bureau ovale la priorité sera donnée à l’éradication de l’EI au détriment de la stratégie anti-Assad.

La coalition anti-Assad repose donc sur des intérêts divergents. La Turquie bombarde en effet les kurdes syriens qui eux-mêmes combattent l’EI, ennemi juré des occidentaux. Ce même Etat Islamique est en conflit avec tout le monde même s’il a pu bénéficier de la complaisance turque pour combattre les kurdes notamment à Kobané. Il a néanmoins connu une partition en son sein avec la scission du front Al-Nosra resté fidèle à la maison-mère Al-Qaeda et qui a formé avec d’autres groupes islamistes l’armée de la conquête (Jaish-Al-Fatah). C’est ce groupe qui tenait les quartiers Est d’Alep et qui tient toujours la province d’Idlib. Comme on peut le voir la situation est d’une incroyable complexité.

Le jeu des acteurs pro-Assad

On peut distinguer deux acteurs clés de ce côté de l’échiquier : l’Iran et la Russie. Cette coalition a l’avantage d’être beaucoup plus cohérente que les anti-Assad. Néanmoins, certaines divergences sont apparues ces derniers mois. Même si elles n’ont pas remis en question l’alliance initiale, il est possible qu’elles exercent une grande influence en cas de négociation de sortie de crise.

En premier lieu, l’Iran est sans doute le partisan le plus zélé du régime syrien. Seul pays arabe à avoir soutenu la révolution iranienne de 1979, la Syrie est de plus un territoire d’une importance capitale pour acheminer les armes iraniennes vers le Sud Liban, fief du Hezbollah ce qui permet ainsi à Téhéran d’avoir une influence directe sur le conflit Israélo-arabe. Les Pasdarans (service de renseignement iranien) ont donc décidé d’intervenir massivement en Syrie en envoyant des officiers et des formateurs. Ils ont également poussé le Hezbollah à intervenir directement en 2013 et ont envoyé des miliciens chiites en majorité irakiens. Les iraniens sont donc essentiels pour fournir le nombre de soldats nécessaires à la poursuite de la guerre. Pour eux, le président Assad est la meilleure garantie pour la défense de leurs intérêts. Bien sûr, la présence iranienne et du Hezbollah en Syrie n’a pas manqué d’attirer l’attention des israéliens. Tolérées par les russes, les frappes de Tsahal contre des Pasdarans et des combattants du Hezbollah ont clairement affaibli les positions iraniennes. Pour les israéliens, la chute d’Assad n’est pas souhaitable, ce dernier, bien qu’ennemi d’Israël, n’ayant jamais entrepris de reprendre le plateau du Golan. Il leur faut pourtant éviter tout transfert massif d’armes vers le Liban. De même, les israéliens ont intérêt à voir l’Iran perdre son influence en Syrie. C’est pourquoi Netanyahu a rencontré Poutine à Moscou l’année dernière, les deux hommes ayant pour intérêt commun de réduire la mainmise de l’Iran au sein du pouvoir syrien.

En effet, même s’ils sont alliés, les iraniens et les russes sont dans les faits des rivaux pour influencer le régime syrien, les russes pour maintenir leur base navale stratégique de Tartous, leur dernière base en Méditerranée, les iraniens pour éviter de se faire évincer de l’échiquier syrien. Assad a habilement su joué de cette rivalité pour se maintenir au pouvoir. Il fut néanmoins à deux doigts de perdre le contrôle de la Syrie avant que les russes n’interviennent en septembre 2015. S’appuyant sur les minorités et la bourgeoisie sunnite, il continue à gouverner la Syrie « utile » de Lattaquié à Damas en passant par Alep bien que ses troupes soient en réalité au bord de la rupture. Sans le soutien russe et iranien, Assad aurait perdu le contrôle de la Syrie.

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Les solutions de sortie de crise

Autant le dire tout de suite, il n’existe pas de solutions idéales pour la Syrie. L’enjeu sera de prendre la moins mauvaise décision, celle qui en tout cas qui engendrera le moins de dégât sur le long-terme. Sur le terrain, aucun acteur n’est suffisamment puissant pour l’emporter. Comme le résume Hubert Védrine : « aucune puissance régionale ne peut imposer sa solution-ni l’Iran, ni la Turquie, ni l’Egypte ne le peuvent, Israël ne s’en mêle pas- et aucune puissance extérieure ne peut jouer aujourd’hui le rôle de Sykes et Picot- et même si Obama et Poutine travaillaient ensemble, ils n’arriveraient sans doute pas à imposer leur schéma. » La situation est d’autant plus complexe que ni les russes ni les occidentaux ne sont en mesure d’envoyer massivement des troupes dans le « bourbier syrien ». Les Casques bleus de l’ONU seraient dès lors totalement impuissants à garantir la stabilité. La meilleure solution à court terme consiste à multiplier les cessez-le-feu bilatéraux entre les belligérants puis de les élargir à l’ensemble du territoire syrien. Ensuite, il faudra négocier une solution de long-terme avec l’ensemble des acteurs sur le modèle des négociations de Genève. Plusieurs scénarios sont envisageables :

1) La formation d’un conflit gelé sur le modèle de la Transnistrie ou du Haut-Karabagh. Ce scénario consiste à maintenir de manière indéterminée un cessez-le-feu. Pourtant, cette solution n’est viable que s’il existe une puissance régionale ou internationale garante de ce cessez-le-feu. Or, en Syrie, le YPD, l’armée de la conquête et l’Etat Islamique échappe à tout contrôle extérieur.

2) Une « libanisation » de la Syrie. Elle consiste à former un état confessionnel ou chaque groupe ethnique est représenté comme au Liban. Ce scénario a l’avantage de faire participer la majorité sunnite au pouvoir. Néanmoins, cette solution est inapplicable dans l’Etat du fait qu’il n’existe pas de garant suffisamment puissant pour assurer la stabilité comme le fut la Syrie d’Hafez Al-Assad lors de la guerre civile au Liban. De même, du fait de leur poids démographique, les sunnites risquent de marginaliser les autres groupes ce qui serait inacceptable pour les alaouites et leurs alliés iraniens.

3) Une formule de type fédéral. C’est le scénario le plus probable. D’une part, le régime syrien semble incapable de reprendre le contrôle sur la totalité du territoire. D’autre part, elle a l’avantage de conserver les intérêts des différentes parties prenantes. Les Iraniens conserveraient ainsi leurs liens avec le Sud Liban et le Hezbollah. Les russes seraient certains de maintenir leur position à Tartous. Les pétromonarchies pourraient se satisfaire de la formation de zones sunnites indépendantes au cœur de l’axe chiite. Quant aux israéliens un accord pourrait être trouvé avec les russes pour garantir le départ des troupes du Hezbollah qui retourneraient au Liban.

Néanmoins, plusieurs difficultés persistent. D’abord, la province d’Idlib aux mains de l’armée de la conquête serait de facto indépendante. Pour éviter la formation d’un sanctuaire terroriste d’Al-Qaeda, il faudra d’abord négocier avec l’armée de la conquête et échanger un laisser faire quant à une indépendance de facto contre la garantie de non-exportation du terrorisme. La rupture entre le front Al-Nosra et Al-Qaeda annoncée à l’été 2016 est un pas positif vers cette solution.

La deuxième difficulté est la question kurde. Il me paraît improbable que les Kurdes abandonnent leurs positions. La solution ne peut venir que d’une reprise des pourparlers entre les turques et le PKK comme ce fut le cas avant 2015 qui serait ensuite étendue au YPD.

Enfin, l’Etat Islamique doit être vaincu ce qui implique de s’intéresser non seulement à la Syrie mais aussi à l’Irak. La frontière syro-irakienne doit être de nouveau fermée dès lors que la plaine de Ninive tombera aux mains de Bagdad. En Syrie, il faudra laisser le régime syrien avec l’aide des russes reprendre Palmyre et la province de Deir Ezzor. Quant à Raqqa et sa région, soit les turques aidés des turkmènes décident de la reprendre et il faudra tout faire pour les y aider, soit ce sont les kurdes qui la reprennent et alors il faudra donner des garanties suffisantes aux turques pour les rassurer. Une paix durable en Syrie ne peut donc reposer que sur une série d’hypothèses extrêmement complexes qui prendront des années voire des décennies avant d’être mises en œuvre.

Par conséquent, le drame syrien n’est pas près de se refermer. Il faut d’urgence favoriser l’établissement de cessez-le-feu avant d’envisager une solution politique. Cette dernière ne pourra qu’être le fruit d’un travail de longue haleine de négociation entre les différents joueurs de l’échiquier syrien. Le problème c’est que nous manquons d’un Richelieu, d’un Talleyrand ou d’un Metternich capables de concilier des positions contradictoires. Nous devons l’admettre, un traité de Westphalie ou un congrès de Vienne pour la Syrie n’est pas pour demain. D’ici là, la partie d’échec continue inexorablement son cours.

(*) Le grand échiquier, Zbigniew Brzeziński

Sources utilisées :

Le nouvel environnement stratégique de Michel Foucher, revue Les Débats

Retour au réel : entretien avec Hubert Védrine, revue Les Débats