Shimon Peres: chronique d’un homme de paix dans un pays en guerre

Shimon Peres: chronique d’un homme de paix dans un pays en guerre

(Cet article a été écrit avant la mort de Shimon Peres intervenue le 28 septembre 2016)

L’ancien premier ministre et président israélien Shimon Peres vit sans doute ces dernières heures. Ayant subi un accident vasculaire cérébral le 13 septembre, celui que l’on surnomme « l’aigle » est entre « la vie et la mort » selon ces médecins. L’homme, âgé de 93 ans, incarne aux yeux du monde entier la volonté de mettre fin au conflit sans fin entre Israël et ses voisins arabes. Honoré à l’étranger, Shimon Peres est pourtant une personnalité controversée en Israël même. Considéré comme naïf, voire utopique, Peres n’a jamais pu trouver un soutien suffisant dans l’opinion pour mener à bien ces projets cumulant les défaites électorales (1977, 1984, 1988,1996) et les échecs politiques (échec de son initiative de paix en 1987). On peut donc bien parler d’un paradoxe Shimon Peres : si c’est un homme très apprécié des médias occidentaux, sa voix a toujours paru inaudible au sein de son propre pays. Porteur de multiples contradictions, le destin de cet homme politique du 20ième siècle restera indiscutablement lié à la vie politique israélienne auquel il restera pour toujours une figure majeure.

Shimon Peres méritait donc bien un article retraçant sa longue carrière embrassant trait pour trait la vie semée d’embûches de l’Etat Hébreu.

 

Le patriote Shimon Peres

Shimon Peres, né Perski (Peres étant son nom de guerre), est né en 1923 dans un village en Biélorussie, Vishneva, au sein d’une communauté juive très croyante et conservatrice. Traumatisés par les multiples pogroms anti-juifs aux confins occidentaux de l’empire russe puis soviétique, les parents du jeune Shimon décident d’émigrer en Palestine, au Yishouv, en 1934. Ils rejoignent alors une terre habitée en grande partie par des arabes mais dans laquelle de plus en plus de juifs se réfugient fuyant les persécutions nazies et staliniennes. En 1938, Shimon Perski s’engage au sein de la Haganah, une milice armée sioniste politiquement de gauche commandée par David Ben Gourion qui fondera par la suite l’Etat d’Israël en 1948. C’est auprès de ce leader charismatique que Shimon Peres fait ses premières armes militaires et politiques.peres-avec-ben-gourion Après la guerre d’indépendance (1948-1949), il rejoint le ministère de la défense au poste de secrétaire général. A ce poste, il sera le véritable maître d’œuvre du rapprochement diplomatique avec Paris et Londres qui conduira à une offensive conjointe pour reprendre le canal de Suez (1956) récemment nationalisé par Nasser. C’est par conséquent à cette époque que Peres abandonne la carrière militaire pour se concentrer sur les affaires diplomatiques. Ce choix aura des conséquences sur sa carrière politique, Peres apparaissant comme un « mou » face à des adversaires politiques (Begin, Sharon, Rabin) issus de l’armée et considérés comme plus réalistes par la majorité des israéliens. En outre, sa politique d’amitié avec les chancelleries européennes (Paris, Londres, Berlin) lui vaudra l’inimitié durable de l’establishment américain lui préférant les partisans d’une ligne plus dure.

 

Le nouveau ministre des territoires occupés

Peres est tout de même élu député en 1959 et devient ministre sous le gouvernement travailliste (gauche) de Golda Meir (1969-1974). Après la guerre des Six-jours (1967) qui a vu Tsahal (forces armées israéliennes) conquérir de vastes territoires (Cisjordanie, Plateau du Golan, Jérusalem-Est, Bande de Gaza), il devient ministre sans portefeuille des territoires conquis. Confronté aux problèmes croissants de la domination israélienne sur des territoires arabes en forte expansion démographique (émeutes, contestation de l’autorité israélienne), Peres est l’un des rares hommes politiques à prendre conscience de l’inéluctabilité d’une révolte d’ampleur de ces territoires. Au contraire, les premiers ministres Golda Meir (1969-1974), Menahem Begin (1977-1983) et Itshak Shamir (1984-1992) ne traiteront pas de ce problème. La surprise fut donc grande en Israël lorsqu’éclata la « première Intifada » en 1987 suivie de la création de nouveaux mouvements (Hamas (2), Jihad Islamique) brisant le monopole de l’OLP(1).intifada Paradoxalement, Shimon Peres ne parviendra pas à capitaliser sur son expérience de ministre, déjà largement battu par le candidat du Likoud (droite) Begin en 1977, il subit une désillusion lors des élections de 1984 ne parvenant pas à obtenir la majorité des sièges. En 1987, il ne parvient pas encore à obtenir le soutien de la Knesset (parlement) pour son projet de paix. Ce dernier devait à terme conduire à la création d’une fédération jordano-palestinienne avec une Cisjordanie démilitarisée. A travers ce projet, Shimon Peres montre des qualités diplomatiques remarquables mais pèche par un excès de naïveté et un manque criant d’habilité politique. Les jordaniens n’auraient pas pu en effet accepter une fédération qui aurait déséquilibré démographiquement le royaume au détriment des tribus bédouines qui y dominent la vie politique depuis son indépendance. De même, Washington n’aurait aucunement accepté l’affaiblissement d’un de ses plus proches alliés en pleine guerre froide. Encore une fois, Shimon Peres ne trouve pas les relais politiques suffisants pour mettre en œuvre ses projets.

 

Le processus d’Oslo : la consécration de Shimon Peres

Au plus bas politiquement, Peres est remis en selle par la victoire d’un de ses pires ennemies Itshak Rabin en 1992. Ce dernier, qui avait chipé à Peres la tête du parti travailliste, souhaite mettre en œuvre un processus de paix avec le leader de l’OLP Yasser Arafat. Pour mener à bien son programme, Rabin fait naturellement appel au diplomate le plus favorable à un accord de paix, Shimon Peres. Ce dernier devient ministre des affaires étrangères. C’est sous sa tutelle que s’enclenche des pourparlers à Oslo entre les deux ennemies. L’environnement géopolitique mondial pousse en effet les deux parties au dialogue. D’une part, l’effondrement de l’Union Soviétique affaibli considérablement l’OLP et le pousse à se rapprocher de Washington, allié indéfectible de l’Etat Hébreu. D’autre part, l’OLP doit faire face à la concurrence croissante du Hamas. Sous pression interne, Arafat se doit d’apporter des signes tangibles de progrès s’il veut détourner les palestiniens de l’influence islamiste. Ce rapprochement sans précédent conduira à une poignée de main historique entre Rabin et Arafat sur le parvis de la Maison Blanche et débouchera sur la reconnaissance mutuelle des deux parties. Shimon Peres sera considéré comme l’architecte de ce processus et sera récompensé par le prix Nobel de la paix en 1994 en compagnie de Rabin et d’Arafat. Glorifié à l’international, Peres devient l’un des symboles de la paix dans le monde.

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L’échec d’Oslo : la triste fin politique de Shimon Peres

Du fait qu’il en a été le maître d’œuvre, Peres subit immanquablement le discrédit dès lors que le processus d’Oslo s’enlise sur le terrain. Ce dernier prévoyait une souveraineté limitée des palestiniens sur certains territoires de Cisjordanie et la Bande de Gaza. Il prévoyait également la mise en œuvre de pourparlers  sur des sujets aussi tendus que le statut de Jérusalem, le retour des réfugiés palestiniens et le démantèlement des colonies juives. Dans les faits, dès lors que les discussions ont portés sur ses sujets, le processus s’est enlisé. D’une part, les protagonistes des deux camps ne peuvent faire des concessions sur des sujets aussi sensibles pour leur opinion respective. D’autre part, les extrémistes des deux camps ont volontairement torpillé le processus qui était il est vrai beaucoup plus mal engagé que ne le laissait penser l’avis unanimement partagé des médias occidentaux. Ainsi du côté israélien, l’assassinat d’Itshak Rabin en 1995 et l’opposition de plus en plus résolue de la Knesset  induit un scepticisme croissant vis à vis du processus d’Oslo au sein de la population. Du côté palestinien, les attentats perpétrés par le Hamas et le Jihad Islamique trouve un écho favorable dans une frange croissante de la population palestinienne.

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Dans ce contexte de désillusion et de montée de la violence, Shimon Peres est largement discrédité et paraît impuissant à contenir la violence aveugle des kamikazes palestiniens. Il est défait par le leader du Likoud Benyamin Netannyahou lors des élections de 1996. Il est ensuite évincé de la tête de son parti par le général Ehud Barak nettement moins « colombe » que lui. En 2004, il quitte son parti pour rejoindre le parti Kadima du premier ministre Ariel Sharon. A tort ou à raison, une partie des israéliens attribue à Peres la responsabilité de l’évacuation de Gaza en 2005 le définissant comme responsable de la prise de la Bande de Gaza par le Hamas en 2007. Même s’il s’agit d’une critique exagérée, elle traduit la méfiance de la population israélienne vis-à-vis d’un homme qu’elle juge naïf et fondamentalement utopique.

Malgré un contexte défavorable sur le terrain, Shimon Peres croit toujours à son projet de paix à « l’européenne ». S’appuyant sur le modèle de l’union européenne, il milite pour la création d’une vaste zone de libre-échange entre Israël et ses voisins arabes. L’interpénétration des économies devant rendre toute guerre contraire aux intérêts économiques des Etats, l’homo economicus aurait remplacé naturellement l’homo bellicus. Or, ce programme est inatteignable en l’état. Premièrement, l’Europe d’après-guerre était sous le contrôle étroit des deux superpuissances (Etats-Unis, URSS) limitant par la dissuasion nucléaire les conflits de grande ampleur, rien de tel dans le cas Israélo-arabe. Deuxièmement, l’Allemagne avait été détruite militairement et placée sous surveillance soviétique et américaine. Ce scénario ne se retrouve pas au Proche-Orient. Enfin, si l’Europe peut se targuer d’avoir une culture commune, le « gap » culturel entre Israélien et palestinien est trop important pour envisager un tel rapprochement dans l’avenir. Encore une fois, Shimon Peres pèche par son tropisme européen le rendant aveugle aux dimensions d’un conflit de plus en plus identitaires et religieux. Son aveuglement face à la montée du Hamas en 1993-1994 est l’exemple frappant de son manque de clairvoyance politique et stratégique. D’ailleurs, son plan s’il suscite un enthousiasme certain chez les élites occidentales est rejeté par l’ensemble des partis directement concernés (Israéliens comme palestiniens).

 

 

Habile diplomate, patriote sincère, visionnaire parfois, Shimon Peres reste cependant largement incompris en Israël. Respecté mais pas populaire, telle pourrait être la formule caractérisant la figure de Peres en Israël. Très proche des diplomates européens, il n’a jamais su s’imposer comme un acteur politique crédible aux yeux de Washington et des israéliens. Manquant de charisme et dépourvu de relais politique suffisant, il a été le candidat le plus battu aux élections générales même lorsque l’élection paraissait acquise (1996). Au fond, Shimon Peres a toujours paru à contretemps de la société israélienne. Sa proposition d’une fédération jordano-palestinienne en 1987 puis son projet « d’européanisation du Proche-Orient » se heurteront à des logiques culturels (identitaires, religieuses) qu’il n’a jamais pris réellement au sérieux. Il n’a d’ailleurs pas compris l’islamisation croissante de la cause palestinienne tout comme la « droitisation » de l’électorat juif. Il fut dans les faits un homme de paix dans un pays constamment en guerre. Malgré tout, sa mort serait une perte pour l’état hébreu qui serait privé de l’un de ses meilleurs ambassadeurs dans le monde. On ne peut que saluer cet homme volontaire bien qu’utopique qui restera jusqu’à la fin de ses jours attaché à la grandeur de son pays.

LeHitra’ot (au revoir) Shimon !

 

(1) OLP: l’organisation de libération de la Palestine fut fondée en 1964  pour regrouper les différentes tendances des nationalistes palestiniens. Son programme est tourné vers un nationalisme laïc.

(2) Hamas: mouvement islamiste proche des Frères Musulmans fondé en 1987 qui appelle dans sa charte à la destruction d’Israël. Il contrôle aujourd’hui la Bande de Gaza.

Livres-sources utilisés :

Djihad de Gilles Kepel

Géopolitique d’Israël de Frédéric Encel et François Thual

LE FN: symptôme des nouvelles fractures sociales

LE FN: symptôme des nouvelles fractures sociales

A la fin du mois dernier, Marine Le Pen a fait sa rentrée politique à Brachay en Haute-Marne. Ce petit village de 60 habitants n’a pas été choisi au hasard. Votant à 70% pour le FN à chaque élection depuis 2012, Brachay devient le symbole de ces petits bourgs ruraux basculant dans le vote frontiste. Ces territoires situés en périphérie des grands centres métropolitains furent longtemps l’objet d’un oubli, voire d’un certain mépris de la part des habitants des grands centres urbains. Pourtant, cette France périphérique risque de jouer un rôle clé lors de la prochaine élection présidentielle. Elle sera en tout cas une des variables majeures du vote FN déterminant par la même l’accès ou non au deuxième tour de Marine Le Pen. Cet article a pour but de comprendre la dynamique frontiste dans ces territoires et d’esquisser une nouvelle sociologie électorale à quelques mois de la présidentielle. Pour tenir cet objectif, je m’appuierai sur un ouvrage de Christophe Guilluy La France périphérique dont les états-majors politiques seraient bien inspirés de lire pour saisir le vote FN.

Quelle est la nouvelle sociologie électorale ? Pourquoi est-elle favorable au Front National ?

Avant de saisir le vote FN, il nous faudra définir la France des métropoles et la France périphérique. C’est en effet uniquement par ce biais que peut se comprendre la dynamique frontiste.

 

La France des métropoles où le symbole de la « mondialisation heureuse »

Les métropoles désignent des aires urbaines importantes composées d’un ensemble d’agglomérations. Le ministère de l’intérieur désigne une métropole dès lors que celle-ci dépasse les 500 000 habitants. Christophe Guilluy définit les métropoles comme les 25 plus grandes agglomérations urbaines soit 10% des communes françaises et 40% de la population (1). On y trouve donc des villes comme Paris, Montpellier, Rennes, Nantes, Grenoble ou encore Bordeaux.

Or, ces métropoles sont celles qui profitent le plus des opportunités économiques issues de la mondialisation. Dans une étude de l’INSEE datée de juin 2014 (2), en moyenne, les métropoles ont connu une hausse de 4,7% des emplois disponibles. De même, la part des métropoles dans le PIB continue d’augmenter depuis 20 ans. La métropole parisienne produit ainsi près de 30% du PIB tout en représentant 18% de la population totale. La métropole lyonnaise représente quant à elle 10% de la richesse nationale selon l’INSEE. La dynamique économique de ces territoires s’explique par sa très bonne intégration à l’économie-monde, à la « mondialisation heureuse » selon l’expression d’Alain Minc. Fort de ses infrastructures et de son intégration dans les flux économiques mondiaux, les métropoles font partie de ce que Pierre Veltz nommait « l’économie d’archipels et de réseaux » (3).

Cette métropolisation est le fruit même de la mondialisation. On retrouve d’ailleurs cette tendance dans l’ensemble du globe. En effet, les échanges mondiaux spécialisent ces métropoles dans des secteurs à haute valeur ajoutée et à haut niveau de qualification (finance, recherche et développement, biens d’industrie très sophistiqués). Ces secteurs attirent des cadres qualifiés mais aussi les meilleurs étudiants ce qui crée un « effet d’agglomération » entrainant une hausse de la productivité globale des métropoles. Logiquement, les cadres sont surreprésentés par rapport au reste du territoire. La métropole parisienne compte ainsi 28% de cadres et Toulouse près de 25% (4).

Or, les métropoles attirent également des emplois peu ou pas qualifiés. En effet, les classes supérieures ont besoin d’un certain nombre de services peu qualifiés (restauration, construction, transport). Ces emplois sont pourvus largement par des travailleurs d’origine étrangère. Selon une étude menée par la démographe Michèle Tribalat (5), en Ile-de-France, 61% des ouvriers sont d’origine étrangère. Par opposition, seuls 24% des cadres ont une origine étrangère. Profitant des logements sociaux, ils comblent le vide laissé par les classes populaires non-issues de l’immigration et les classes moyennes évincées des métropoles par la hausse des prix du logement. Cette situation crée une inégalité manifeste entre les cadres, la plupart blancs, et les employés précaires issus majoritairement des populations immigrées. On comprend à présent pourquoi beaucoup d’observateurs réduisent la question sociale à une opposition ethnique entre la majorité « blanche » et les minorités. Cette « ethnicisation » de la question sociale conduit donc à une grille de lecture directement inspirée des sociétés anglo-saxonnes. Ainsi, les banlieues des métropoles sont assimilées aux « ghettos » américains et concentreraient l’essentiel de la pauvreté en France. Or, cette grille de lecture passe complétement sous silence les difficultés de la France périphérique et par voie de conséquence la dynamique du Front National.

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La France périphérique où la grande perdante de la mondialisation

La France périphérique recoupe l’ensemble des territoires en dehors des grands centres métropolitains. Elle est donc une réalité complexe composée aussi bien de territoires ruraux, de grands bourgs ou de villes moyennes. On place donc dans la catégorie France périphérique des villes comme Charleville-Mézières, Fréjus, Hénin-Beaumont ou encore des villages ruraux et des communes péri-urbaines éloignées des centres métropolitains. D’après Christophe Guilluy (1), ces territoires représentent 60% de la population française.

S’ils existent des différences entre ces territoires, le dénominateur commun de la France périphérique repose sur une même dynamique de déclassement économique et sociale. Laurent Davezies dans son ouvrage La crise qui vient distinguait entre les territoires marchands et non marchands de cette France périphérique.

Les territoires marchands en difficulté sont des espaces à forte tradition industrielle. On retrouve dans cette catégorie les anciens bassins miniers du Nord (Lens, Hénin-Beaumont, Tourcoing) et de l’est de la France (bassin lorrain). De plus, on retrouve des territoires anciennement très productifs comme le territoire de Belfort, la Franche-Comté ou encore des villes comme Montluçon mais également des territoires agro-industriels comme l’arrière-pays breton. florange-arcelormittal-1_4087850Ces territoires sont marqués par une surreprésentation de la classe ouvrière (30% contre 23% en moyenne en France selon Davezies (6)). Or, ces territoires subissent de plein fouet le choc de la mondialisation. D’après Davezies (6), les emplois ont reculé en moyenne de 4,5% depuis 2009, soit trois fois plus que dans l’ensemble du territoire national. Nous avons vu que le libre-échange, par « l’effet d’agglomération », concentre la création de richesses dans les métropoles. A l’inverse, la France périphérique, fragilisée par la faible qualification de la main d’œuvre, voit l’ensemble des activités industrielles quitter ces territoires. Il s’agit donc de la France de la désindustrialisation et des « plans sociaux ».

Les territoires non marchands en difficulté quant à eux recoupent des espaces déjà désindustrialisés. D’après Laurent Davezies (6), entre 1982 et 2006, les emplois de fabrication se sont réduits de 40% représentant la destruction de 250 000 emplois. Aujourd’hui, les revenus des ménages proviennent à 60% de la redistribution publique (prestations sociales ou retraites). Ces zones correspondent à des départements essentiellement ruraux comme la Creuse, les Pyrénées-Orientales ou l’Aude.

La France périphérique est donc une réalité multiforme qui a pour point commun un déclassement économique issue de la mondialisation. Selon la théorie économique, ces inégalités territoriales ne seraient pas un problème dans un marché où la libre circulation des travailleurs est garantie, les travailleurs des zones sinistrées se déplaçant vers les zones les plus dynamiques. la-france-ruraleOr, cette mobilité du facteur travail est fortement entravée par les prix prohibitifs des logements en métropole. De même, étant situé dans des espaces en déclin économique, il est très difficile de trouver un acheteur si l’on souhaite quitter la France périphérique. Cette « assignation à résidence » contribue pour beaucoup à la marginalisation économique et culturelle de ces territoires. De même, ces derniers constatent la suppression irréductible des services publics (la Poste, SNCF) et des commerces de proximité. Cette France est aussi la France des « déserts médicaux ». Or, ces territoires ont été les grands oubliés de l’offre politique au point que le FN a su habilement combler le vide existant.

 

Le FN, grand vainqueur de la nouvelle géographie sociale

La vision anglo-saxonne des inégalités sociales, basées sur la dichotomie entre les centres urbains et les banlieues, a occulté complètement la question de la France périphérique. Cette dernière a trouvé dans la radicalité politique un mode d’expression de leur marginalisation. Le FN n’est d’ailleurs pas le seul bénéficiaire de cette contestation. Selon les identités régionales, en effet, la France périphérique se tourne vers le FN mais aussi vers des groupes régionalistes (Bonnets rouges en Bretagne et nationalisme en Corse). Il faut, de plus, souligner que la radicalité politique s’exprime majoritairement dans l’abstention. Cependant, sans compter l’abstention, le FN bénéficie largement de cette recomposition territoriale.

Dès lors que Marine Le Pen a écarté son père de la direction, le FN a connu une hausse considérable de voix étant aujourd’hui en nombre de votes le premier parti de France. Ce succès s’explique par sa captation des voix de la France périphérique. En effet, Marine Le Pen a su ébaucher un projet politique répondant directement à la marginalisation de ces territoires. Ainsi, lors des municipales de 2014, toutes les villes remportées (Hénin-Beaumont, Fréjus, Villers-Cotterêts, Béziers,…), à l’exception du VIIème secteur de Marseille, sont situées dans la France périphérique. Lors des régionales de 2015, la candidate Frontiste Marion Maréchal-Le Pen a recueilli 52% des voix  dans le département du Vaucluse (7). De même, Louis Aliot, vice-président du FN, est arrivée en tête dans deux départements de la région Languedoc-Roussillon (7). A l’inverse, le FN obtient des scores décevant dans les grandes métropoles. A Bordeaux, lors des présidentielles de 2012, le FN n’a recueilli que 8,22% (chiffres du ministère de l’intérieur) contre 18% dans l’ensemble de la France. Une étude du Monde montrait qu’aux municipales de 2014, le FN atteignait le second tour dans 70% des villes de 10 à 20 000 habitants dans lequel il était engagé tandis que ce score tombait à 40% pour les villes de plus de 200 000 habitants (8).

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Ces résultats électoraux traduisent le fossé de plus en plus grand entre une France des métropoles acquises aux partis de gouvernement (PS, UDI, UMP) et une France périphérique plus favorable au FN. Toute chose égale par ailleurs, la Droite représente en effet les catégories supérieures insérées dans la mondialisation. La Gauche a pour électorat la classe populaire des grandes métropoles majoritairement issues de l’immigration mais aussi les « bobos » des centres villes. Deux électorats protégés de la mondialisation sont encore hostiles au Front National, les retraités (plutôt à droite) et les fonctionnaires (plutôt à gauche). D’ailleurs, ces deux catégories représentent le principal « plafond de verre » empêchant le FN d’accéder aux responsabilités. On voit bien à travers cette cartographie sociale que la mondialisation a un effet puissant sur la géographie électorale. Il n’est donc pas surprenant que le FN a abandonné le discours reaganien de Jean-Marie Le Pen au profit d’un discours étatiste et protectionniste. La critique de l’Union Européenne doit également se comprendre à l’aune de cette stratégie, l’Europe étant vue comme le cheval de Troie de la mondialisation pour beaucoup de français. L’homme clé de ce tournant stratégique est le vice-président du Front National Florian Philippot. Ce dernier a bien vu que la France périphérique s’est tournée massivement vers Nicolas Sarkozy en 2007 avant d’être terriblement déçue par son quinquennat. Le FN a donc adopté son discours pour séduire cet électorat. Il est donc stupide de parler de « lepénisation des esprits ». En matière politique, c’est l’électorat qui oriente la stratégie des partis politiques et non l’inverse.

Aux vues de l’importance des inégalités entre les gagnants et les perdants de la mondialisation, on aurait pu penser que l’extrême gauche serait bien placée pour séduire la France périphérique. Pourtant, c’est le FN qui rafle la mise. En effet, ce dernier répond à une autre préoccupation de la France périphérique : l’insécurité culturelle. L’immigration a toujours été le fonds de commerce du FN mais cette problématique s’inscrit dorénavant dans une cohérence globale centrée sur un discours de protection contre la mondialisation. Ceci est un élément primordial car l’immigration est devenue dans ces territoires le symbole visible de la mondialisation et de la perte de souveraineté. L’opposition est d’ailleurs frappante entre la France métropolitaine et la France périphérique sur cette question. Une étude Ipsos datée de janvier 2014 avait montré que pour 72% des cadres la France doit s’ouvrir davantage au monde tandis que 75% des ouvriers pensent qu’elle doit se protéger (9). C’est cette demande de protection de la France périphérique face aux effets de la mondialisation (délocalisation, multiculturalisme) qui explique le vote FN.

 

L’importante visibilité des difficultés de la France des métropoles (inégalités économiques, émeutes dans les banlieues, trafic de drogue) a donc complètement occulté la France périphérique. Il est en effet à la mode de dire que la pauvreté se concentre dans les quartiers « sensibles ». Or, d’après l’INSEE, sur les quatre départements les plus pauvres de France, trois (l’Aude, le Pas-de-Calais et les Pyrénées-Orientales) sont situés dans la France périphérique. Ce qu’on oublie trop souvent de mentionner c’est la réussite économique des métropoles en France. Intégrée à la mondialisation, elles bénéficient des dividendes procurés par le libre-échange même si elles subissent de nouvelles fractures inhérentes au monde globalisé (tensions ethniques, islamisation des banlieues, inégalités). C’est contre ce modèle globalisé et multiculturel que s’est forgée une véritable unité de la France périphérique. La mondialisation a en effet signifié pour elle le déclassement économique et sa marginalisation culturelle et politique. C’est dans ce contexte que le FN est apparu comme le moyen de faire entendre son désarroi. Ce dernier ne s’est pas privé de conquérir cet électorat en recentrant son discours sur la mondialisation comblant le vide laissé par les partis traditionnels. La droite et la gauche ont été en effet obnubilées par la France des métropoles. Or, la quasi absence de représentation de la France périphérique dans les instances de pouvoir ne fait qu’accroitre l’amertume et la rancœur de ces territoires. Pour l’instant, le vote FN canalise toute cette colère mais rien ne dit qu’elle ne trouvera pas des expressions encore plus radicales à l’avenir.

 

(1) La France périphérique : Comment on a sacrifié les classes populaires de Christophe Guilluy

(2) http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=99&ref_id=ip1503

(3) Mondialisation, villes et territoires : une économie d’archipel de Pierre Veltz

(4) Insee Première, n°1503, juin 2014

(5) La fin du modèle français, de Michèle Tribalat (2013)

(6) La crise qui vient, La nouvelle fracture territoriale de Laurent Davezies

(7) http://www.francetvinfo.fr/elections/regionales/regionales-les-trois-chiffres-qui-montrent-que-le-fn-n-a-pas-tout-perdu_1221735.html

(8) http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/03/25/municipales-les-performances-du-fn-passees-au-crible_4389411_4355770.html

(9)Ipsos, enquête « fractures françaises », 2014

 

Le mythe du califat

Le mythe du califat

29 juin 2014. Peu après la prise de la ville par les combattants de l’Etat Islamique, la mosquée de Mossoul, en Irak, devient le lieu d’une étrange cérémonie. Devant un parterre de fidèles, le chef terroriste Abou Bakr Al-Baghdadi proclame le califat. Lui-même décide de prendre le titre de calife Ibrahim. Cette annonce a provoqué une véritable onde de choc dans le monde musulman. Le calife y est en effet considéré comme une figure symbolique essentielle pour assurer l’unité de la communauté des croyants (Oumma). Or, depuis 1924, le califat avait disparu du paysage politique et fut même considéré comme un objet du passé. En France, la notion de califat est souvent méconnue, voire incomprise. Très peu d’intellectuels se sont intéressés à la réalité historique du califat. C’est l’ambition d’un livre écrit par un chercheur du CNRS Nabil Mouline qui montre de manière clairvoyante que le califat est plus un mythe qu’une réalité. L’objet de cet article sera donc d’analyser le rôle joué par l’autorité califale au sein de l’Islam.

Qu’est-ce que le califat ? Quel a été son rôle dans l’histoire du monde musulman ?

 

La place du califat dans l’Islam

Le Coran et la tradition prophétique (Sunna) distingue trois types de gouvernance politique : le califat, l’imam et le commandeur des croyants (Amîr al-muminîn). La notion de califat apparaît plusieurs fois dans le Coran. Ainsi, Adam est considéré comme le premier calife. Ce dernier est le représentant de Dieu sur terre. Le calife a donc comme mission de gouverner selon les commandements de Dieu. Dans la tradition musulmane, le calife ne fait qu’appliquer les commandements divins. En soi, le seul gouvernant possible est Dieu (Allah). coranLe pouvoir et l’autorité sont des attributs exclusivement divins. Cette soumission à Dieu (Islam) est la principale caractéristique de la religion musulmane vis-à-vis des autres religions monothéistes. Il est très vraisemblable que le terme de calife était déjà utilisé pour désigner les successeurs de Mahomet avant même les Omeyyades (661). D’ailleurs, la culture islamique contemporaine appelle ces hommes les califes « bien guidés » (Rashidun).

Le califat est donc une des formes de gouvernance politique censée diriger la communauté des croyants (Oumma). Le terme d’Oumma revêt d’une importance cruciale dans le monde musulman. Elle instaure en effet une communauté de sens, une fraternité dans une Arabie en proie à des rivalités claniques et tribales récurrentes. Le calife incarne donc l’unité de cette communauté. Or, l’Oumma sera traversée par des conflits internes qui vont donc considérablement affaiblir le pouvoir califal.

 

La Fitna au sein de l’Islam

Lorsque s’éteint Mahomet en 632, la question de son successeur n’est pas tranchée. N’ayant pas d’héritiers reconnus, le pouvoir revient à ses compagnons. Abu Bakr (632-634) puis Omar (634-644) prendront ainsi la tête de l’Oumma. Les califes ont pour objectif d’éviter les dissensions internes comme l’avait fait Mahomet lorsque celui-ci dirigeait Médine (622-630). Considérés comme les représentants de Dieu sur terre, les califes bénéficient d’une légitimité en principe absolue au sein de l’Oumma. Or, le calife Omar est assassiné de manière obscure. De plus, son successeur Othman (644-656) est lui-même assassiné suite à une rébellion. La légitimité califale est donc déjà sérieusement entamée par les luttes de pouvoir  entre clans rivaux. Après Othman, Ali devient calife mais subit une rébellion qu’il ne parviendra jamais à écraser. Il est assassiné en 661. S’ensuit un conflit entre les partisans d’Ali et de son fils Hussein qu’on nomme les Chiites, diminutifs de Shiat’Ali (partisans d’Ali), et les partisans de Muawiyya, membre du clan d’Othman, qu’on nommera plus tard les sunnites. Cette guerre civile (Fitna) provoquera un traumatisme sans précédent chez les populations musulmanes. Après 30 ans de relative unité, l’Oumma est divisée et ceux jusqu’à aujourd’hui. Or, en plus d’être assassinés (3 assassinats en 30 ans), les califes voient leur autorité considérablement déclinée suite aux grandes conquêtes arabes. N’ayant pas de véritable administration, les empires arabes feront l’objet de nombreuses révoltes qui chez certaines d’entre elles aboutiront à l’émergence de pouvoirs rivaux et indépendants des califes.

Cette division se poursuivra au fil de l’histoire. Au Xème siècle, le monde de l’Islam est divisé en trois califats : Abbassides à Bagdad, Omeyyades dans la péninsule ibérique et Fatimides au Caire. Plus tard, d’autres empires se formeront en Inde (Mogol), en Perse (Safavides) ou dans le monde arabe et balkanique (Ottoman). Toutes ces divisions au sein de l’Islam contribueront à ôter au califat tout son prestige et son autorité.

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L’affaiblissement du pouvoir califal

Le califat, en tant que facteur d’unité du monde musulman, est donc incapable de surmonter les divisions inhérentes de l’Oumma. Or, même dans les régions où ils possèdent encore une autorité, les califes se verront peu à peu privés de tout pouvoir ne servant plus que de caution symbolique au rêve d’unité de la communauté des croyants.

Les premiers califes bénéficiaient d’une autorité religieuse qui leur conférait le droit d’imposer des règles théocratiques à leurs sujets. Omar et Othman ont ainsi légiféré sur le pèlerinage, le mariage ou encore la manière de prier. C’est sous le calife Abdel Malik Ibn Marwan (685-705) qu’est adoptée la première Sunna composée du Coran et des récits relatant la vie de Mahomet (Hadith). Or, cette intrusion des califes dans la norme religieuse est de plus en plus contestée par des spécialistes du droit musulman (Fiqh). Ces derniers reprochent aux califes de détourner le message originel de l’Islam pour leurs seuls profits. Se forme dès lors un corps d’expert s’adjugeant l’interprétation de la religion musulmane. Ces savants qu’on appelle les Oulémas seront les seuls habilités à traiter des normes religieuses. Les Oulémas deviennent les gardiens de l’orthodoxie islamique au détriment des califes qui perdent tout pouvoir religieux.

Les califes ne perdent pas seulement la gestion du culte mais également le pouvoir politique et militaire. Lors des premier temps de l’Islam, les califes ont un pouvoir militaire considérable. Ainsi, c’est en tant que chef de guerre incontesté que le calife Omar conquiert Jérusalem puis l’empire Sassanide. Or, à partir de l’assassinat d’Othman par des soldats en 656, l’armée sera de moins en moins un soutien fidèle au pouvoir califal. Menacés, les califes feront progressivement appel à des protecteurs qui fort de leur protection se verront offert des pouvoirs politiques importants. role-du-califeSous les califats abbassides de Bagdad (750-1258), la protection militaire est offerte par une tribu chiite, les Bouyides. Il s’agit donc d’un califat sunnite sous protection de militaires chiites ! Après les bouyides, ce sont les Seljoukites qui deviendront les protecteurs des califes abbassides prenant le titre de Sultan. Pour retrouver leur indépendance, les califes tenteront de mettre sur pied une véritable armée professionnelle. Dans le but d’éviter les divisions tribales, les califes feront appel à des esclaves, les Mamelouks. Or, ces derniers finissent par échapper aux contrôles du califat au point qu’ils formeront eux-mêmes leur propre califat en Egypte (1260-1517).

Petit à petit, les califes perdent tout pouvoir et n’exercent plus qu’une fonction symbolique. Après la destruction de Bagdad en 1258 par les descendants de Gengis Khan (mongols) qui marque la fin du califat abbasside, un ouléma Ibn Taymiyya (1263-1328) ira même jusqu’à s’interroger sur l’utilité du califat.

 

Le Califat à l’époque moderne 

Au 19ième siècle, il ne subsiste qu’un seul califat, celui des ottomans, dans tout le monde musulman. Or, le calife n’y dispose que d’un pouvoir restreint. De plus, dès la campagne d’Egypte de Bonaparte (1798-1799), les idéaux de la Révolution Française commence à pénétrer le monde islamique sapant la légitimité califale. Suite à la colonisation européenne, les élites politiques musulmanes sont de plus séduites par les modèles politiques des Etat-nations. Après l’effondrement de l’empire Ottoman en 1918, c’est donc en toute logique que Mustapha Kemal abolit le califat en 1924. L’heure est à l’époque aux nationalismes laïcs, voire au panarabisme.

Le califat sera dès lors totalement oublié. Seul Hassan Al-Banna (1906-1949), fondateur des Frères Musulmans, fera du retour du califat un objectif de long terme. Les premiers groupes terroristes, Al-Qaeda en tête, dans la lignée d’Ibn Taymiyya, ne considèrent pas le rétablissement du califat comme une priorité. C’est pourquoi la proclamation du califat à Mossoul par l’Etat Islamique a tant surpris les observateurs. Plusieurs raisons expliquent ce choix. Tout d’abord, le califat est le symbole de l’unité de la communauté des croyants. Se proclamer calife confère donc à Al-Baghdadi une autorité symbolique pour appeler l’ensemble des musulmans au Djihad. Deuxièmement, il offre à des jeunes en quête d’identité une bannière à laquelle ils peuvent s’identifier. Le califat étant synonyme de royaume de Dieu sur terre, se battre pour lui donne aux combattants de l’Etat Islamique une justification divine à leurs actes. Enfin, le rétablissement du califat apparaît comme un pied de nez à Al-Qaeda, son rival djihadiste. En effet, ce dernier est une organisation terroriste globale et déterritorialisée. Au contraire, Daesh s’appuie sur un territoire qu’il administre comme un Etat. Le califat fait donc partie intégrante de cette stratégie de reterritorialisation du Djihad.

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Le califat a donc joué un rôle important dans l’histoire du monde musulman. Successeur de Mahomet à la tête de la communauté des croyants (Oumma), le calife a vu ses pouvoirs politiques, militaires et religieux se réduire comme peau de chagrin. Les califes n’ont également pas pu éviter le conflit interne à l’Islam tant cette religion fut minée par les luttes de pouvoir et les différences d’interprétation des textes sacrés. Le calife ne jouait donc plus qu’un rôle honorifique et symbolique pour maintenir la fiction de l’unité de l’Oumma. D’ailleurs, le rétablissement du califat par Daesh n’a qu’une fonction symbolique destinée à des fins stratégiques et de propagande. Le retour du califat traduit néanmoins le fait que le monde musulman dans son ensemble se cherche encore la forme politique qui lui correspond tiraillé qu’il est entre des divisions nationales, tribales, claniques et religieuses. Le califat de l’Etat Islamique n’est donc qu’une réponse à ce désarroi politique qui touche plus particulièrement le Moyen-Orient.

 

Sources utilisées :

Le Califat de Nabil Mouline

La fin des Empires : le rêve inachevée des empires arabes de Jacques Paviot

Article du Diploweb de Patrice Gourdin :

http://www.diploweb.com/Daesh-restaure-le-Califat.html